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Après l’Europe, la Russie…

Economie avril 2013

Après l’Europe, la Russie…

Les négociations avec le Vieux Continent bloquent, pourquoi ne pas voir ailleurs? Ce n’est pas qu’une question d’économie, semble-t-il. Décryptage.

De l’eau a coulé sous les ponts qui relient le Royaume à l’Union européenne. L’indignation marocaine après l’annulation d’un accord de pêche en décembre 2011 a cédé sous le poids des enjeux politiques et économiques, pour se déverser en vagues de négociations jusque-là stériles. Malgré le soutien indéfectible d’une Espagne en crise, partenaire premier et presque obligé, le Royaume continue de fuseler sa stratégie halieutique, sous l’égide d’un ministre technocrate qui mise sur la discrétion. Contacté par Economie&Entreprises, Aziz Akhannouch a préféré garder le silence tant que l’accord n’a pas été renouvelé. Et pour cause, le sujet est très sensible. Déjà à l’heure où le Parlement européen rejetait l’extension de l’accord de pêche liant l’Union européenne au Maroc, Rabat manifestait sa colère par un ton menaçant, allant jusqu’à envisager «l’opportunité d’une réévaluation globale de son partenariat avec l’UE, à l’heure où des négociations sont en cours (…) sur d’autres volets de coopération, à savoir le commerce des services, la mobilité et la réadmission», peut-on lire dans le communiqué du ministère des Affaires étrangères et de la Coopération. Surtout que les raisons invoquées par l’instance européenne soulevaient la question délicate du Sahara marocain. A l’heure actuelle, les pourparlers seraient bloqués par un accord encore incertain sur la contrepartie financière d’une autorisation de pêcher sur les côtes marocaines. Une situation qui mine les relations diplomatiques maroco-européennes et remet sur la table la stratégie internationale du département de la pêche maritime. Mais si le Maroc ne peut pas se défaire de ses liens avec le Vieux Continent, qu’est-ce qui l’empêche de diversifier ses accords de pêche? Une stratégie sur laquelle les officiels refusent de s’étendre.

«Si le Maroc ne peut pas se défaire de ses liens avec le Vieux Continent, qu’est-ce qui l’empêche de diversifier ses accords de pêche?»

«Pour l’instant, nous ne sommes pas à la recherche de nouveaux partenaires», intime sobrement Zakia Driouich, secrétaire générale du département de la Pêche maritime auprès du ministère de l’Agriculture. Elle rappelle que l’UE demeure un partenaire privilégié du Maroc et ce, depuis de nombreuses années. Une pudeur politique compréhensible mais regrettable dans la mesure où cette diversification des accords de pêche pourrait, et devrait être, un levier de croissance pour l’halieutique marocaine. C’est en tout cas ce que défend Miloud Loukili, professeur de droit maritime à l’Université de Rabat. Selon lui, l’halieutique est une carte que le Maroc doit déployer: «Je serais même tenté de dire que le Maroc est une puissance halieutique et la diversification des partenaires est incontestablement un manque à gagner». Si le Royaume a renouvelé, en février dernier, son accord de pêche avec la Russie lors de la deuxième édition du salon Halieutis, il pourrait étendre ses horizons stratégiques du côté asiatique, notamment en concluant des accords avec la Chine ou le Japon. Mais c’est surtout vers l’Afrique que le Maroc doit se tourner. En effet, la visite du Monarque le mois dernier chez ses voisins subsahariens a renforcé sa position dans le domaine de la pêche. Le Maroc a notamment conclu un accord de pêche avec la Côte d’Ivoire, qui recevait pour la première fois le Souverain. Dans la même lignée, le pays a signé un accord avec le Sénégal pour l’ouverture d’une ligne maritime entre les deux pays. Cela marque un premier pas vers cette africanisation tendancielle de la politique halieutique du pays.